Ion Creanga (1837-1889), dit aussi « Nica, fils de Stefan, lui-même fils de Pétré le Savetier », aîné d’une nombreuse fratrie de paysans bénéficia de deux grands protecteurs : sa mère Smaranda, qui lui donna non seulement vie mais le poussa à s’instruire, et Mihai Eminescu, le grand poète, à qui il doit sa naissance en tant qu’écrivain.
Son parcours est assez atypique. Sa biographie est retracée notamment dans ses Souvenirs d’enfance. Il est villageois et le reste. À partir de 1847 il apprend à lire et écrire avec le chantre de l’église du village. Ensuite, sa mère, tenace dans sa décision de le voir s’instruire à tout prix, l’envoie à l’école de Broşteni, puis de Târgu Neamţ. Après l’école de catéchèse de Fălticeni, il continue sa formation au séminaire de Socola, pour devenir prêtre.
Diplôme en poche, en 1859 il se marie et est ordonné diacre, officiant pendant trois ans notamment à l’Église des Quarante Martyrs de Iaşi. Il suit parallèlement les cours de l’École normale et obtient son diplôme d’instituteur. Il exerce cette profession alors qu’il continue ses activités de diacre.
Mais voilà, qu’en 1871, il ose porter un chapeau à la place de la toque noire orthodoxe, ce qui soulève un tollé de la part du clergé. De surcroît, il est dit qu’il aurait chassé la corneille, pratique qui va à l’encontre du canon d’un concile local. Il est donc « chassé » lui-même (déposé) du clergé, par le Métropolite de la Moldavie, tandis que le ministre de l’instruction publique, Christian Tell, le destitue du poste d’instituteur, sous prétexte d’immoralité ! Ultérieurement, Titu Maiorescu le remettra dans ses fonctions.
Sur incitation de son grand ami Mihai Eminescu, il publie son premier conte : La belle-mère aux trois belles-filles ; une prose naît ainsi, faite d’infinie subtilité, de jovialité et de bonne humeur aidant le fantastique à descendre sur terre. Ses héros ne sont autres que des paysans ou des animaux merveilleux empruntant aux villageois leurs traits de caractère et de comportement : La chèvre et ses trois biquets ; La petite bourse aux pièces d’or ; L’histoire du cochon.
La dernière partie des Souvenirs d’enfance paraîtra à titre posthume, car l’auteur s’éteint le 31 décembre 1889, quelques mois après son ami Mihai Eminescu.