Étrange personnage de la littérature roumaine moderne, Demetru Demetrescu-Buzau, qui a pris comme
pseudonyme littéraire le nom fictif d’Urmuz, publia ses premières « Pages bizarres » en 1922, avant de se suicider en 1923. Son existence fut brève, sa carrière littéraire météorique, et son
œuvre l’une des plus courtes possibles - quelques petits morceaux de prose et un poème. Néanmoins, grâce au culte que les jeunes écrivains lui dédièrent dès lors, Urmuz exerça une grande
influence sur l’avant-garde roumaine des années 1920, 1930 et 1940, qui le considéra comme son ancêtre mythique. Son nom et ses quelques écrits ont été souvent mentionnés dans les pages des
revues dadaïstes, constructivistes et surréalistes roumaines, telles que 75HP, Integral, Punct et surtout unu. Une de ces revues s’est tout simplement
intitulée urmuz.
Magistrat de profession, et grand connaisseur de musique, Urmuz avait composé ses histoires absurdes bien avant leur publication, c'est-à-dire pendant les premières années de la décennie
1910.
Il les envoya ensuite à des amis et les dissémina même auprès d’inconnus,
dans des cafés et des restaurants. Très prudent quant à la publication de ses brefs écrits, Urmuz hésita longtemps avant de les envoyer à une revue littéraire, où, par hasard, ils tombèrent
entre les mains du grand poète moderniste Tudor Arghezi. Celui-ci comprit vite qu’il s’agissait de petits chefs-d’œuvre et commença à les publier au début des années 1920.
Après la mort de l’auteur, Arghezi, Ion Vinea et d’autres écrivains modernistes continuèrent à promouvoir l’œuvre hors du commun d’Urmuz, qui influença au fil du temps nombre de poètes connus
tels que Tristan Tzara, Gherasim Luca, Isidor Isou, voire Paul Celan, et le dramaturge Eugène Ionesco.
Si l’on prend en compte la date de l’élaboration de ses textes en prose, et non pas leur date de publication, on peut considérer Urmuz comme un véritable précurseur du dadaïsme, comme du
surréalisme, à l’échelle européenne.